18 avril 2004

Les cinq dernières minutes
Je me souviendrai longtemps de mon retour à Warwick : le voyage le plus nul de tous les temps.

Tout démarre à l'aéroport de Bergerac, dont j'ignorais l'existence. En fait, l'aéroport fait 200m2, un loft au milieu de la campagne. Evidemment, la douane m'a pris la tête et m'a emmené dans un bureau pour fouiller mon sac en profondeur. Dire que j'avais mis une heure à tout plier !

Arrivéee à Stansted. Coach pour Londres, puis correspondance d'une heure. Au bout d'une heure, je m'aperçois que j'attends au mauvais endroit. J'arrive 5 minutes trop tard. J'attends celui d'après. 23h30. Nouvelle tentative. Bien sûr, avoir raté mon premier car ne me donne aucun privilège. J'attends donc derrière Bob Marley et les Wailers (ou leurs sosies), qui ont en plus deux enfants qui pleurent. Résultat : je suis recalé. Il me faut un train.

Direction Euston. L'Underground va fermer. Je prends un taxi et 15 livres plus loin, j'y suis. Evidemment, plus de train pour Coventry. Que faire ? un agent m'indique un hotel "cheap". Il pleut des cordes à sauter. Sur la route, je croise Katie Holmes, en tenue de soirée. Elle me dit "hello", je réponds "mmgrr", j'ai les mâchoires serrées. Le "County hotel" me propose une chambre à 40 livres, avec commodités sur le palier (!).

Où dormir ? Je retourne voir l'agent, pour être bien sûr qu'il s'est foutu de ma gueule. Je suis trempé, j'en ai marre, à m'en taper la tête contre les murs. Il me propose d'attendre jusqu'à 2h, heure de fermeture de la gare, puis de m'emmener dans un coin sombre. Suspense. Page de pub.

J'entame une nouvelle phase d'attente, on dirait du Beckett. En plus, une femme d'environ 40ans vient s'asseoir pas loin de moi. Elle porte 2 sacs en plastique et un visage figé. Comme un automate qui sortirait de chez Tesco. Toutes les 3 minutes, elle se met à dodeliner, à faire "non" de la tête. Et puis elle tapote de l'index la paume de son autre main. Je veux lui parler, mais les mots ne sortent pas. Je veux qu'elle me raconte son histoire, si elle a des gosses et comment ils s'appellent. Rien ne sort.

Vient 2 heures, nouveau transit. Une 25ème heure, dans ce voyage immobile au bout de la nuit. Dans la salle d'attente, il y a un Noir et 3 teenagers. Tout le monde est assoupi. Je m'installe comme je peux, le coeur entre 2 chaises et la main sur le cul (pour adoucir les angles métalliques). La nuit dure 3 heures, et l'amour, 3 ans, je me répète.

Je parviens à dormir une heure, que je remplis d'un rêve de Sandy. Un rêve couleur Sépia, et serein comme la pub Eternity de Calvin Klein. Tendresse, caresses. Instinct de survie. De l'utilité du rêve. C'est l'une des premières fois que je rêve de Sandy. Note : je promène un pigeon (ou une mouette) en laisse. Tendresse, caresse. Je finis par jouir sur les seins et le visage de Sandy.

Je me réveille à 5 heures, à la réouverture. Je vais me rafraichir. Je retrouve la dame au tic, la femme automatique. Encore 3 heures d'attente. Je prends un grand café (1,5 livres !) en pensant bien à me brûler la langue, puis à en renverser sur mon pantalon. Puis coach jusqu'à Milton Keynes, et enfin train. Virgin train. Pendolino.

Génial ! Je peux brancher mon casque dans le siège et écouter de la musique. Les toilettes ressemblent au module de téléportation de Star Trek (rotonde, tout y est automatique).

Me voilà à nouveau dans cette chambre, froide. Le dernier term va déjà commencer.